La guerre civile 1990-94

Depuis la révolution Hutu de 1959, les Tutsi exilés n'avaient jamais abandonné l'espoir de retrouver un jour leur patrie. Après avoir essuyé plusieurs pertes lors de leurs incursions dans les années qui suivirent la proclamation de l'indépendance, ils décidèrent de s'organiser. Ils acquirent en exil un entraînement militaire et un savoir-faire, notamment au sein de l'armée ougandaise, qu’ils mirent à profit pour organiser leur propre armée destinée à envahir le Rwanda. Ils considéraient que la guerre constituait le seul moyen de rentrer au pays, étant donné que les gouvernements Hutu successifs depuis 1962 n’avaient jamais accepté leur retour. Fin 1987, le FPR-Inkotanyi fut créé, un mouvement politico-militaire qui lança, le 1er octobre 1990, une attaque contre le Rwanda depuis l’Ouganda. Ses troupes parvinrent à occuper une partie du territoire au nord du pays, l'armée gouvernementale se montrant incapable de les déloger, malgré l'appui des troupes étrangères, notamment françaises.

Le régime d’Habyarimana ethnicisa directement le conflit, et les Tutsi de l'intérieur du Rwanda en payèrent à nouveau le prix fort. En effet, suite à cette attaque, le gouvernement polarisa les positions et tensions interethniques. Déjà confronté à des revendications politiques internes, il mobilisa les Hutu contre les Tutsi vivant au Rwanda, ces derniers étant qualifiés indistinctement de complices du FPR, et par conséquent d'ennemis du pays. Environ dix mille Tutsi et opposants Hutu furent maltraités et jetés en prison. Parmi eux, un nombre indéterminé y trouva la mort. Au nord du pays, notamment dans la région natale du président, des centaines de Tutsi furent également tués, et d'autres chassés de leurs terres.

Par ailleurs, sous la pression de la communauté internationale qui souhaitait une démocratisation du pays, le président autorisa le multipartisme. De nouveaux partis politiques virent alors le jour. Les revendications, à la fois internes et externes, pour une démocratisation de l’ensemble des rouages politiques et de la société rwandaise se firent de plus en plus pressantes et affaiblirent davantage le régime d’Habyarimana. Ce dernier se trouvait désormais fragilisé avec, d'un côté, son autorité menacée au nord par le FPR, et de l’autre, des opposants politiques Hutu de plus en plus virulents. Habyarimana dut accepter de libérer les Tutsi et les Hutu arrêtés sous prétexte d'être complices du FPR. Il accepta également, du moins formellement, le principe de négociations avec le FPR, pour mettre fin à la guerre et discuter du partage du pouvoir. Hélas, « les durs » du régime, c'est-à-dire son entourage direct composé de civils et de militaires en majorité nordistes, rejetèrent toute perspective de partage du pouvoir. Le MRND créa, en août 1991, une milice paramilitaire, les Interahamwe, pour constituer le bras armé du parti, composé de civils, exécuteurs des basses œuvres.

En avril 1992, l'opposition et la communauté internationale imposèrent au président Habyarimana un gouvernement multipartite de transition, qui entama sans tarder des négociations avec le FPR, à Arusha, en Tanzanie. Ces négations aboutirent aux accords de paix d’Arusha, signés le 4 août 1993, lueur d'espoir pour le peuple rwandais, en particulier pour les Tutsi vivant à l'intérieur du pays. Afin de veiller à l’application de ces accords, l'ONU décida de l'envoi d'une force de maintien de la paix, la MINUAR (Mission des Nations unies pour l'assistance au Rwanda). Toutefois, les accords de paix ne faisant pas l'unanimité, à partir de l'été 1993, la scène politique rwandaise vit s'affronter deux camps : les partisans et les opposants aux accords d’Arusha. Plusieurs partis politiques se scindèrent selon cette ligne de fracture, et les accords de paix ne furent jamais mis en application.