Recherche

LES THEMATIQUES

La production normative à l’échelle nationale et européenne

(Marie-Aude BEERNAERT)

Cet axe de recherche renvoie à l’analyse synchronique et diachronique de la réglementation nationale, européenne et internationale en matière pénale.

Les études comparatives des systèmes juridiques nationaux, l’analyse de la construction progressive d’un droit pénal européen et celle de l’évolution du droit conventionnel permettent d’examiner l’influence exercée par le cadre normatif supranational sur le droit interne et de mettre en évidence les domaines dans lesquels des options nationales contrastées subsistent encore. Il s'agit aussi de questionner la compatibilité des choix – législatifs ou jurisprudentiels – nationaux au regard des exigences des droits de l'Homme, en particulier dans le champ du droit de la procédure pénale.

Les recherches de type qualitatif visant à reconstruire les processus législatifs permettent d’identifier, à la fois, les principaux acteurs et les principaux enjeux qui sous-tendent la production législative.

Ce type de recherches permet non seulement d’apporter une contribution substantielle à la connaissance du droit positif, mais aussi de dévoiler des aspects méconnus des processus de production législative. La démarche critique, qui consiste à interroger les fondements des choix législatifs, et notamment la requalification des phénomènes sociaux opérée par le droit, participe à la construction d’un champ de controverses qui peut s’avérer fructueux pour l’évolution du droit pénal.

 

La politique criminelle dans une perspective évaluative

(Marie-Sophie DEVRESSE, Vincent FRANCIS, Dan KAMINSKI, Thibaut SLINGENEYER)

Cet axe de recherche vise tout particulièrement l’analyse des dispositions normatives, des programmes et des pratiques de terrain dans le domaine de la politique criminelle entendue au sens large. Ainsi, est envisagée dans cette perspective l’analyse de dispositifs aussi diversifiés que les contrats de sécurité, la politique des drogues, la peine de travail, la surveillance électronique des condamnés ou la politique criminelle relative à la traite et au trafic des êtres humains. Les programmes de recherche développés dans cet axe peuvent faire l’objet d’une commande émanant des pouvoirs publics ou être réalisés d’initiative par les chercheurs en fonction des travaux en cours. La dimension évaluative des analyses produites s’actualise dans divers types d’approches : évaluation de programme (analyse des besoins, évaluation d’implantation…), évaluation processuelle (études de la mise en forme des interventions) ou encore, évaluation d’impact (effets et produits des dispositifs envisagés).

 

Les peines et leur lecture pénologique

(Vincent FRANCIS, Thibaut SLINGENEYER, Damien VANDERMEERSCH)

Cet axe de recherche consiste en l’étude institutionnelle, organisationnelle et professionnelle, éthique et clinique de la réaction à la problématique du crime et de la déviance, dans sa globalité et dans ses diverses composantes. Dans sa globalité, on peut dire que cet axe de recherche vise à l’élucidation des formes contemporaines et historiques de la pénalité. Si la pénalité est avant tout une institution sociale, dont l’étude doit d’ailleurs être insérée dans l'analyse de systèmes élargis d'action sociale et politique (ou d’autres dispositifs de sécurité) et dans une signification culturelle changeante, elle dispose aussi d’un appareillage organisationnel et technique complexe (l’administration de la justice pénale) destiné à mettre en œuvre cette rationalité et à en fabriquer massivement les produits (que sont des décisions, des populations et des chiffres) ; cet appareillage fait l’objet d’usages sociaux que révèlent des pratiques professionnelles (dans les secteurs de la police, de la justice et de l’exécution des décisions judiciaires) et profanes (opinion publique, décisions politiques, représentations médiatiques ou fictionnelles, et comportements des victimes notamment).

L’étude de l’administration de la justice pénale et des dispositifs de sécurité associés recouvre trois grandes perspectives de recherche que l’on peut se représenter sous la forme de cercles concentriques de plus en plus larges.

1) Une perspective sectorielle, axée sur l’examen des logiques institutionnelles, organisationnelles et professionnelles des secteurs d’activités que sont la police, la juridiction – poursuite et jugement – ainsi que le domaine diversifié de l’exécution des mesures et des peines (qui fait l’objet notamment de la pénologie). On insistera dans cette perspective sur les changements récents des structures, des législations, des objectifs des institutions et de leur management ainsi que sur l’impact de ces changements sur les logiques et les pratiques professionnelles des agents du système d’administration de la justice pénale.

2) Une perspective transversale (qui traverse et transcende les organisations et pratiques singulières qui lui donnent consistance) dans laquelle, à la suite des travaux de David Garland notamment, domine l’élucidation théorique des transformations contemporaines de la pénalité.

3) Une perspective plus large encore qui consiste à étudier l’émergence et la transformation des formes de gouvernementalité dans les sociétés libérales avancées. Plus précisément, elle tend à dégager, selon les termes de Michel Foucault, l’ensemble des discours et des pratiques constitué par les institutions, les procédures, les analyses et les réflexions, les calculs et les tactiques qui permettent d’exercer une forme de pouvoir a) dont la cible principale est la population et les sous-populations, b) dont la forme majeure de savoir est l’économie politique, c) dont les instruments techniques essentiels sont les dispositifs de sécurité. Concrètement, les recherches poursuives ou envisagées s’attachent à dégager les objectifs, les modes de fonctionnement et les connaissances utiles de différents mécanismes de contrôle social, comme le recours à la vidéosurveillance, à la libération conditionnelle ou aux banques de données génétiques. Dans cette démarche, l’accent porte tout spécialement sur la manière dont ces mécanismes renvoient et contribuent aux modes de gouvernance qui caractérisent les sociétés libérales avancées.

 

La protection de la jeunesse dans ses rapports avec la déviance et la pénalité

(Thierry MOREAU)

Cet axe de recherche est articulé autour de la catégorie spécifique des mineurs en rapport avec la déviance et la délinquance. Les travaux ont notamment pour objet (1) de réfléchir à la signification des comportements déviants et délinquants des jeunes, d’étudier les éléments favorisant ces comportements et (2) d'analyser et évaluer les dispositifs de prévention et de réaction à ces comportements. La perspective se veut interdisciplinaire et les recherches sont menées en étroit rapport avec le Centre interdisciplinaire des droits de l'enfant qui, historiquement, est né dans le voisinage immédiat du CRID&P.

 

Les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité ainsi que la mise en jugement de leurs auteurs

(Damien VANDERMEERSCH)

Depuis 1993 la communauté internationale a créé des juridictions pénales internationales. Celles-ci ont pris des formes bien différentes : tribunaux ad hoc, juridictions mixtes ou internationalisées, cour pénale internationale. Cet axe de recherche envisage d'en étudier les différents statuts et d'en évaluer la pertinence. Sont en outre étudiés les rapports entre les juridictions internationales et les tribunaux nationaux. Un bilan plus large retient également l'attention : l'incidence de ces juridictions dans les rapports Nord-Sud.

 

Les apports de la psychiatrie, de la psychologie et de la psychanalyse à la criminologie et à la justice pénale

(Antoine MASSON, Christophe ADAM)

Les travaux s’inscrivant dans cet axe de recherche ont trait

- aux théories de la criminogenèse et aux dimensions psychiques engagées dans le crime, le passage à l’acte, la délinquance ;
- aux spécificités de l’expertise psychologique et psychiatrique ;
- à l’étude de problématiques spécifiques telles que la responsabilité, la dangerosité, les logiques de l’aveu ;
- à l’étude des dispositifs de prévention et de traitement de la délinquance sous ses différentes formes.

Selon les champs d’investigation les recherches de cet axe s’inscrivent conjointement dans un autre des axes de travail du CRID&P (par exemple, les recherches plus spécifiques de la clinique adolescente peuvent être conjointes avec l’axe « protection de la jeunesse »).
D'autres travaux portent sur le crime et la peine dans une perspective de criminologie clinique. Il s’agit d’examiner les différentes connaissances criminologiques relevant spécifiquement de la démarche clinique et d’en exposer les singularités, la portée et les retombées théorico-pratiques.
Enfin, des travaux concernent l'étude critique des systèmes classificatoires psychologiques et psychiatriques. Il s’agit d’étudier de manière critique les classifications « psy- », la démarche classificatoire elle-même (saisie dans ses différentes productions telles que typologies, catégorisations, etc.) ainsi que les intelligibilités multiples dont elles participent. Cet axe s’inscrit dans le projet plus vaste d’une critique du paradigme classificatoire dans les sciences exactes et sociales dans une perspective épistémologique et d’histoire des sciences.

 

La place des victimes dans le système pénal et la réparation des préjudices

(Damien VANDERMEERSCH)

La problématique des victimes d’infractions pénales relève à la fois du droit pénal, du droit civil et du droit administratif. Liées à l’actualité, les recherches développées dans ce domaine visent à fonder une connaissance scientifique permettant de dépasser les discours publics basés sur l’émotion.
L’étude de la place croissante faite aux victimes dans le cadre de la procédure pénale permet de poser la question de leurs attentes, celle de l’équilibre à conserver avec les droits de l’auteur présumé de l’infraction, notamment la présomption d’innocence, et de s’interroger sur la modification progressive du procès pénal, considéré par certains comme lieu de thérapie.
L’analyse de l’évolution du droit des victimes au niveau national, européen et international permet en outre de suivre l’élargissement progressif des systèmes d’indemnisation et de comparer leurs fonctions et effets respectifs.

 

Justice pénale et innovation

(Marie-Sophie DEVRESSE, Dan KAMINSKI)

Cet axe de recherche envisage l’analyse des dynamiques de changement et de transformation qui animent la pénalité contemporaine. Un premier volet de l’analyse consiste en l’analyse de dispositifs et de pratiques qui sont présentées et perçues comme « innovantes » dans la justice pénale ou dont l’analyse de la mise en œuvre permet la mise au jour de transformations de l’activité ou de la rationalité du SAJP. Cet axe de recherche vise à la fois le droit pénal, les normes administratives, les procédures et les techniques, les mesures alternatives ainsi que l’éventail des peines et leur exécution. Un second volet de l’analyse consiste à s’interroger sur la pertinence d’une référence au concept d’innovation pour rendre compte des transformations aujourd’hui à l’œuvre dans le champ de la justice criminelle et de la pénalité.