Garçons prébubères et fertilité après un cancer

LOUVAINS

Comment préserver la fertilité des jeunes garçons atteints d’un cancer ? Comme le font souvent les meilleurs remèdes, il s’agit ‘d’imiter’ au mieux la nature.

Vaincre un cancer, c’est venir à bout des cellules cancéreuses. Mais aussi offrir une vie normale aux patients après leur rémission. Or la radiothérapie et la chimiothérapie utilisées pour stopper la maladie abîment l’organisme, notamment des jeunes garçons chez qui ces traitements ont un effet négatif sur la fertilité. « Après la puberté, la production de spermatozoïdes démarre. On peut alors les congeler en vue d’un désir d’enfant plus tard », explique la Pr Christine Wyns, chercheuse au Laboratoire de gynécologie de l’Institut de Recherche Expérimentale et Clinique (IREC) de l’UCL. Soutenues notamment par le Télévie et le FNRS, ses recherches visent à trouver comment préserver des gonades pour les garçons prépubères traités contre un cancer. « Avant la puberté, il n’y a pas de production de spermatozoïdes. Il faut préserver les spermatogonies, les cellules souches présentes dans les testicules », précise-t-elle.

Objectif : produire des spermatozoïdes

Depuis 2005, l’équipe de la Pr Wyns développe des protocoles pour congeler les tissus testiculaires contenant ces cellules souches. Plus tard, le tissu cryopréservé pourra être décongelé et, théoriquement, greffé chez les patients en rémission pour produire des cellules reproductrices matures. Mais ce n’est pas une solution pour ceux dont le tissu testiculaire risque d’être contaminé par des cellules cancéreuses. C’est pourquoi les chercheurs étudient la maturation in vitro du tissu testiculaire prépubère. Il s’agit de reproduire, en laboratoire et au sein de ce tissu, le processus de production des spermatozoïdes à partir des spermatogonies appelé spermatogenèse. « C’est un système de culture du tissu entier qui permet d’imiter au mieux l’environnement naturel de la cellule souche ».

Un tissu prépubère mis en culture

Les résultats de ces travaux ont été publiés dans la revue Human Reproduction et récompensés par la Belgian Society for Reproductive Medecine. « Nos études ont permis de reproduire l’évolution du tissu testiculaire en culture telle qu’elle se produit naturellement. L’environnement de la cellule souche est constitué de cellules de support à la spermatogenèse, les cellules de Sertoli, qui ont un comportement différent en phase prépubère et postpubère », dit Christine Wyns. En phase postpubère, elles arrêtent de se diviser et de secréter certaines substances. « Nous avons démontré que le tissu prépubère mis en culture ne produit pas de testostérone mais qu’il commence à en produire en cours de culture comme en phase postpubère ». Reste aux chercheurs à fournir à cet environnement les substances naturellement amenées par la circulation sanguine.

Vers un testicule artificiel ?

Autre voie de recherche en maturation in vitro suivie par les chercheurs de l’UCL : combiner les aspects transplantation et maturation in vitro. « Nous voudrions isoler les cellules du testicule, éliminer les cellules cancéreuses et développer un support aux cellules testiculaires isolées capable de recréer in vitro l’environnement nécessaire à leur maturation en vue d’être transplanté au patient après son traitement », indique la professeure. Ces travaux sont à la pointe de la recherche en restauration de la fertilité à partir de tissu testiculaire immature. S’il faudra encore du temps avant d’aboutir à une solution efficace chez l’humain, les résultats sont déjà très encourageants.

Audrey Binet
Chargée de communication

> www.fondationsaintluc.be/projets/fertilite-masculine-projet-2014-fondation-saint-luc

La fête de printemps est organisée sur le site de l’UCL à Bruxelles Woluwe au profit du Télévie. De 12h à 21h30 : animations pour enfants, les 10 km d’Alma, ‘Almapéro’ et Mister Cover en clôture. Bienvenue à tous ! Une surprise vous attend en pp. 30-31.

La Pr Christine Wyns, chercheuse au Laboratoire de gynécologie de l’Institut de recherche expérimentale et clinique (IREC) et Francesca de Michele, doctorante titulaire d’un grant FNRS Télévie.

Photo :  Alexis Haulot

Article paru dans le Louvain[s] de mars-avril-mai 2017