14 septembre 2018
9h - 17h
Bruxelles
Université libre de Bruxelles - Auditoire FORUM G
Journée d'étude - La recherche transdisciplinaire au sein des universités
LAAP, Université catholique de Louvain et Centre d'Appui pour l'Action Co-Create, Université libre de Bruxelles
La recherche transdisciplinaire dans les universités : contextualisation
La recherche transdisciplinaire vise à concilier l’expertise scientifique avec l’expertise extra-scientifique (Popa, Guillermin, Dedeurwaerdere, 2014). Il ne s’agit pas d’une juxtaposition de savoirs mais bien de la production d’une connaissance inédite, comme le préfixe "trans" l'indique, « qui est à la fois entre les disciplines, à travers les différentes disciplines et au-delà de toute discipline. Sa finalité est la compréhension du monde présent, dont un des impératifs est l'unité de la connaissance » (Nicolescu 2014: 27). Concrètement, un projet de recherche transdisciplinaire rassemble en son sein différents acteurs, scientifiques ou non, concernés par une problématique ciblée. À travers des méthodologies adaptées, en émerge un type de connaissance partant de l’expertise de chaque acteur engagé. La recherche transdisciplinaire se trouve parfois identifiée sous la dénomination de recherche action participative avec laquelle elle a en commun la caractéristique qui nous intéresse ici : la mise en dialogue de différents types de savoirs pour la production de connaissances au sujet d’une thématique de recherche commune.
En transgressant les frontières disciplinaires pour faire émerger une nouvelle forme de connaissance (Piaget, 1967), la recherche transdisciplinaire se donne comme objectif de contribuer aux progrès scientifiques et, plus largement, aux progrès sociétaux (Jahn, Bergmann, Keil, 2016). Ce courant de recherche, particulièrement adapté pour traiter des problématiques complexes, est aujourd’hui reconnu comme un levier pour les enjeux de durabilité et de transition de nos sociétés (Hirsch Hadorn et al., 2006; Brandt et al. 2013; Mauser et al. 2013). De nombreux chercheurs et acteurs de terrain trouvent du sens à s’engager dans ces modes de production de connaissances, répondant de cette manière à des besoins de changement exprimés sur le terrain.
Pourtant, à la différence de l’interdisciplinarité qui est aujourd’hui reconnue dans l’univers scientifique et plébiscitée par certains organismes de recherche subsidiant, la recherche transdisciplinaire s’installe timidement et non sans tensions dans les universités (Lang et al., 2012). Au côté des missions de recherche et d’enseignement, les universités belges affichent toutes une mission de “service à la société” ou de “service à la collectivité” ou à la “citoyenneté”. De par son ancrage dans l’action et de par l’intégration dans le dispositif de recherche des acteurs concernés, la recherche transdisciplinaire contribue activement à remplir cette mission de service à la société. Or, force est de constater qu’elle perçoit aujourd’hui une faible attention ; en témoigne le peu de financement existant pour le développement de ce type de recherche ainsi que l’absence de réflexion au sujet de ses enjeux épistémologiques et méthodologiques dans le cadre des cursus universitaires. De plus, le système d’évaluation actuel de la recherche basé quasi exclusivement sur le ranking des publications scientifiques s’avère inadapté à ce mode de production de connaissances et pénalisant pour les chercheurs qui s’engagent dans des projets transdisciplinaires. De par leur engagement dans l’action, ces chercheurs se voient souvent reprocher de “basculer dans une posture militante”, considérée comme inconciliable avec une posture scientifique et pouvant remettre en cause la légitimité scientifique des connaissances qu’ils produisent. Participer à l’expérimentation et réfléchir « avec » (et non pas seulement « sur ») les praticiens et les citoyens, semble ainsi constituer une pratique risquée et relativement peu valorisée dans le monde universitaire. Si la dynamique participative et la gestion de la tension entre une posture du chercheur « dedans » et « dehors » ne sont pas nouvelles pour certaines disciplines menant des études de terrain (Laplantine, 1987), son implémentation dans des projets de recherche transdisciplinaire génère des questionnements et des enjeux spécifiques dans les universités.
Une journée interactive de partage d’expériences et de réflexion
L’originalité de cette journée d’étude est de mettre en dialogue les différents acteurs concernés par la recherche transdisciplinaire au sein des universités : chercheurs, doctorants, promoteurs, acteurs institutionnels de la recherche, organismes de financement, etc. A travers des moments de réflexion collective, de partages, d’échanges et de mises en perspective, cette journée sera l’occasion de réfléchir ensemble sur les tensions et les difficultés mais également sur le sens, les motivations et les enjeux de la recherche transdisciplinaire au sein des universités. Elle s’articulera autour de temps en ateliers thématiques et de temps de débats transversaux.
La recherche transdisciplinaire ouvre un large champ de questions. Cette journée se focalisera spécifiquement sur celles liées aux défis et aux enjeux liés à la mise en œuvre de ce mode de recherche dans les universités :
- Pourquoi faire de la recherche transdisciplinaire dans les universités ? Quelles sont nos motivations? Quelle est l’utilité de nos productions et leur plus-value par rapport à d’autres types de recherche ?
- Quels liens tisser et/ou entretenir entre engagement dans la société civile et engagement dans les universités ? La distinction recherche fondamentale/recherche appliquée est-elle pertinente dans la recherche transdisciplinaire ?
- Comment les projets de recherche transdisciplinaire peuvent-ils construire la légitimité des connaissances qu’ils produisent et quelle est leur contribution spécifique à la science ?
- Comment valoriser une expérience transdisciplinaire dans le milieu académique ? Quelle évaluation adéquate proposer à des chercheurs investis dans des recherches à caractère transdisciplinaire ?
- Comment renforcer la légitimité de la recherche transdisciplinaire dans les universités et auprès des organismes de financement ?
- Comment former les chercheurs et futurs chercheurs à la recherche transdisciplinaire ?
Comment participer à cette journée ?
Cette journée est ouverte à toute personne intéressée par la thématique. Elle s’adresse néanmoins plus spécifiquement aux chercheurs et chercheuses impliqué(e)s dans la transdisciplinarité, aux promoteurs et promotrices de projets de recherche transdisciplinaire, aux organismes de financement de la recherche et aux acteurs institutionnels des universités.
Vous pouvez contribuer à cette journée de deux manières :
- En soumettant une contribution orale
Est invitée à soumettre une contribution toute personne souhaitant partager une expérience ou des questionnements vécus en lien avec le thème de la journée. Les contributions attendues auront pour particularité de reposer sur un récit d’expérience vécue par le(s) contributeur(s) ainsi que sur une proposition d’analyse des enjeux suscités par le récit. En nous partageant un récit, vous nous proposez une expérience concrète basé sur votre expérience de terrain. A travers des récits, « (…) on n’échange pas des « idées en l’air », on analyse ensemble ce qui se joue dans une situation précise révélatrice d’enjeux complexes » (Van Campenhoudt, Chaumont, Franssen, 2005 : 67). Les récits et analyses que nous retiendrons devront questionner votre vécu ou votre expérience de la transdisciplinarité ; le récit permettant avant tout de rester ancré(e) dans la réalité et de s’assurer que cette journée d’étude soit basée sur des enjeux qui vous habitent et questionnent la transdisciplinarité.
Les contributions retenues prendront la forme de présentations orales de 15 minutes dans un des ateliers thématiques et serviront de support à l’échange et au débat. Ces contributions pourront faire l’objet d’une publication suite à la journée.
Les modalités de soumission d’une contribution sont décrites ci-dessous.
- En tant que participant(e)
Les participant(e)s ne soumettant pas de contribution seront invité(e)s à contribuer activement dans les discussions et élaboration de pistes d’action lors des ateliers thématiques et des débats transversaux. Afin de permettre une bonne organisation de la journée, l’inscription est obligatoire même si vous ne soumettez pas de contribution (voir infos pratiques).
Modalités de soumission d’une contribution
" Extended deadline "
Merci de soumettre le résumé de votre contribution en français avant le 20 juillet 2018 suivant le document accessible en cliquant ICI
Dates à retenir
20 juillet 2018 : Date limite pour l’envoi du résumé de la contribution
27 juillet : Notification aux auteurs de l'acceptation de leur contribution.
31 août : Date limite des inscriptions en ligne
14 septembre : Journée d’étude
Infos pratiques
Inscription obligatoire ICI
Date : 14 septembre 2018 de 9h à 17h
Lieu :
Auditoire FORUM G
Université libre de Bruxelles
Campus de la Plaine, Boulevard du Triomphe, 1050 Bruxelles
Plan d’accès : ici
Métro ligne 1 – arrêt Delta
Bus 71 – arrêt Fraiteur
Pour toutes questions ou informations :
transdisciplinarite2018@cocreate.brussels
Comité d’organisation
Audrey Vankeerberghen pour le Centre d’Appui de l’action Co-Create (CACOC) / Agroecology Lab (ULB)
Julie Hermesse pour le Laboratoire d’anthropologie prospective (LAAP), UCL
Comité scientifique
Dedeurwaerdere Tom, Biogov Unit, Centre for Philosophy of Law, Earth and Life Institute, UCL
Hermesse Julie, LAAP, UCL / Innoviris
Hulhoven Xavier, Innoviris
Laurent Pierre-Joseph, LAAP, UCL
Stassart Pierre-Marie, SEED, ULg
Van Dyck Barbara, SPRU – STEPS Centre, Sussex University
Van der Linden Maëlle, LAAP, UCL / Innoviris
Vankeerberghen Audrey, Centre d'Appui pour l'Action Co-Create / Agroecologylab - Université Libre de Bruxelles
Visser Marjolein, Agroecologylab - Université Libre de Bruxelles
Références :
Bourdieu P., 2001, Contre-feux 2, Paris, Liber-Raisons d’agir.
Brandt P., A. Ernst, F. Gralla, Ch. Luederitz, D. J. Lang, J. Newig, F. Reinert, D. J. Abson, et H. von Wehrden, 2013, « A review of transdisciplinary research in sustainability science ». Ecological Economics 92: 1-13.
Hirsch Hadorn G., D. Bradley, Ch. Pohl, S. Rist, et U. Wiesmann. s. d. « Implications of transdisciplinarity for sustainability research ». Ecolo 60 (1): 119-28.
Jahn T., M. Bergmann, et F. Keil, 2012, « Transdisciplinarity: Between mainstreaming and marginalization ». Ecological Economics 79: 1-10. https://doi.org/10.1016/j.ecolecon.2012.04.017.
Lang, D.J., Wiek, A. Bergmann, M. Stauffacher, M. Martens, P. Moll, P. Swilling, M. Thomas, C.J., 2012, “Transdisciplinary research in sustainability science: practice, principles, and challenges”. Sustainability Science 7 (S1), 25-43.
Laplantine F., 1987, « Les tensions constitutives de la pratique anthropologique » in L’anthropologie, Ed. Payot et Rivages.
Mauser W., G. Klepper, M. Rice, B. S. Schmalzbauer, H. Hackmann, R. Leemans, et H. Moore, 2013, « Transdisciplinary global change research: the co-creation of knowledge for sustainability ». Current opinion in Environmental Sustainability 5 (3-4): 420-31.
Nicolescu B., 2014, « Methodology of Transdisciplinarity ». World Futures 70 (3-4): 186-99. https://doi.org/10.1080/02604027.2014.934631.
Piaget J., 1967, « Le système et la classification des sciences ». In Piaget J. et al., Logique et connaissance scientifique, Paris, La Pléiade :151-1224.
Popa F., Guillermin M., Dedeurwaerdere T., 2015, « A pragmastic approach to transdisciplinarity in sustainability research: from complex systems theory to reflexive science ». Futures, 65: 45-56.
Van Campenhoudt, L., Chaumont, J.-M. et A. Franssen, 2005, La méthode d’analyse en groupe: applications aux phénomènes sociaux. Dunod. Paris.