Axes de recherche: les recherches transversales

CPRI

Ces axes de recherche sont envisagés de manière transversale en ce qu’ils couvrent des notions et des questionnements relevant de plusieurs domaines du droit privé.

Les normes donnant corps au droit privé se présentent classiquement sous la forme d’un triptyque distinguant les règles d’ordre public, les règles impératives et enfin les règles supplétives. Les deux premières (dont la différence trouve plus ou moins écho, en France, dans la distinction entre ordre public de direction et ordre public de protection) formeraient une manière de « droit intense » doté d’une protection renforcée. L’un des traits principaux de cette protection tiendrait à l’obligation faite au juge de sortir de sa réserve de principe dans le choix et l’application des bases juridiques du litige.

Il y a là une autre synergie fondamentale entre le droit matériel privé et le droit judiciaire privé.

Et cette synergie a tout récemment pris un autre tour, très spectaculaire. Revenant sur une jurisprudence séculaire, la Cour de cassation a, ces dernières années, renforcé les devoirs proprement juridictionnels du juge, l’obligeant, ou au pire l’autorisant, à trancher le litige conformément à la règle de droit…de quelque nature qu’elle soit. Au vu de cette nouvelle dévolution des rôles du procès civil, le droit intense perd une bonne partie de sa spécificité.

Cette spécificité irait-elle, à terme, jusqu’à disparaître complètement ? On croirait volontiers que l’autre trait distinctif du droit intense (étant l’interdiction d’y déroger par convention) ne pourrait, quant à lui, s’estomper. Et pourtant…Plus récemment encore, la même Cour a dit pour droit qu’une partie ne pouvait se plaindre de la violation d’une règle procédurale d’ordre public lorsque l’application qui en a été faite résultait des écritures mêmes de cette partie. Où l’on voit la loyauté l’emporter sur le droit le plus intense.

Le législateur lui-même, au gré de plusieurs lois récentes, invite les individus à devenir acteurs de leurs droits en ce qu’il accorde, dans la solution aux litiges familiaux notamment, la faveur aux accords entre les personnes, dans des matières généralement encore considérées comme relevant de l’ordre public. 

Ira-t-on jusqu’à traiter à l’identique des accords contraires au règles touchant, cette fois, à l’ordre public matériel ? Ces évolutions constitueraient-elles la manifestation ultime de la vanité de toute distinction rationnelle et stable entre le droit intense et le droit supplétif ? Ou faut-il y voir l’émergence de deux ordres publics distincts, articulés sur des enjeux et des régimes propres : l’ordre public matériel, d’une part, et un ordre public spécifiquement procédural d’autre part ?

L’indemnisation des dommages collectifs est, à l’heure actuelle, à l’avant-scène et à la croisée de la responsabilité et du contentieux judiciaire. En raison des transformations propres aux sociétés de consommation et de l’évolution des technologies, un même acte dommageable (catastrophes industrielles ou écologiques, actes de terrorisme, notamment) peut entraîner une multiplicité de dommages. La justice est parfois démunie pour traiter efficacement et avec célérité les plaintes des victimes. Ce constat amène à réfléchir à la mise en place de nouveaux concepts et de nouvelles procédures (intérêt collectif, actions de groupe ou de classe, accords collectifs d’indemnisation, procédures idoines et accélérées…).