La lettre et l'intime

La lettre et l'intime : l'émergence d'une expression du for intérieur dans les correspondances privées (17e-19e siècles)

4e de couverture

Depuis le 17e siècle, la lettre et l'intime sont étroitement liés. Décrite comme "un morceau de notre vie pour une autre personne. Une pensée pour l'autre. Un autre visage de ce que nous sommes. Et cet autre visage tente de s'approcher de l'autre", la première représente une des voies privilégiées d'accès au second. Elle entrouvre une porte sur ce "for intérieur" qui échappe le plus souvent à l'historien comme au contemporain, d'autant qu'il n'est pas nécessairement possible ou simplement bienséant de s'en ouvrir, fût-ce à des proches. C'est ce qui est vécu, éprouvé, ressenti par l'individu, même contraint par de multiples codes sociaux et enserré dans des réseaux qui s'enchevêtrent, qui s'offre alors au lecteur.

Cette approche de l'intime se retrouve dans chacune des analyses présentées ici et constitue le coeur du recueil lui-même, né pourtant d'une cironstance fortuite : le transit par les Archives de l'UCL d'une correspondance exceptionnelle, près de 10.000 lettres échangées entre 1832 et 1850 par la Reine Louise-Marie d'Orléans, épouse de Léopold Ier, et sa mère, la Reine Marie-Amélie, épouse de Louis-Philippe.

La richesse de cette correspondance a fait germer, puis se concrétiser, l'idée d'une journée d'études avec un double objectif : confronter les travaux réalisés à Louvain-La-Neuve avec ceux de collègues travaillant sur des documents similaires, mais venant d'autres horizons; dresser un premier bilan du travail déjà accompli sur le corpus de correspondance royale.

Plus particulièrement, ce sont deux questions qui ont été proposées aux participants : d'une part, comment la lettre réussit-elle à exprimer le for intérieur, le vécu intime, les sentiments les plus personnels, à la fois pour le destinataire contemporain de la lettre et pour son lecteur historien, d'autre part comment les correspondances, dans leur régularité et leur rythmique, réussissent-elles à dessiner de véritables réseaux sociaux et familiaux à concrétiser le lien qui en unit les membres. En filigrane, s'y retrouve naturellement l'interrogation, très actuelle sur l'évolution des liens sociaux et familiaux, des pratiques et des valeurs qui les sous-tendent.

 

Table des matières

Introduction - Paul Servais et Laurence van Ypersele

I. Les correspondances privées. Un document pour l'histoire du for intérieur

  • La "mise en scène" épistolaire. Cas d'une correspondance familiale (France 19e sièècle) - Cécile Dauphin

II. Les correspondances aux 17e et 18e siècles

  • "Mon coeur ne peut plus rien celer". Correspondance transocéanique de Marie (Guyart) de l'Incarnation à son fils Claude (17e siècle) - Raymond Brodeur
  • Monseigneur(s) et ami(s). La correspondance de John Geddes et de George Hay (1759-1799) - Clothilde Prunier
  • L'expression de l'intimité chez les épistolaires anglaises au 18e siècle. De la théorie à la pratique - Alain Kerhervé

III. La correspondance entre Marie-Amélie et Louise-Marie d'Orléans

  • Entre parole publique et intimité du dire - Laurence Van Ypersele
  • Manières d'écrire, manières de communiquer - Paul Servais
  • Une intimité dévoilée au détour d'une vie de château - Véronique Fillieux
  • "L'affaire de Marie". Heurs et malheurs d'un projet de mariage avorté - Malik Léonard
  • Entre drame familial et tragédie dynastique. La mort de "Babochon" - Ludovic Laux
  • Les relations de voyages officiels des souverains belges et des souverains français en 1833 - Ségolène Charpentier
  • Entre horreur et politique. L'attentat de Fieschi - Caroline Goulard