28-29-30 novembre, La Havane
Organisation : Comité consultatif de déontologie et d’éthique (CCDE) de l’IRD, Comité national cubain de bioéthique (CNCB), Institut national d’oncologie et de radiobiologie (INOR), Alliance française
Contexte
Le secteur de la santé fait un appel croissant aux biotechnologies pour découvrir, tester et produire de nouvelles molécules : vaccins, protéines recombinantes, anticorps monoclonaux, thérapies cellulaires et géniques, vecteurs viraux, etc. et aussi pour mieux diagnostiquer les maladies et en mieux comprendre la physiopathologie. Le rôle de l'industrie pharmaceutique s'en trouve modifié. Dans le même temps, les systèmes de santé, les institutions cliniques et les interactions entre chercheurs, professionnels de la santé et patients sont transformés voire bouleversés. A terme se pose également la question du contrôle des dépenses croissantes de santé, y compris dans le cadre potentiel d'une médecine dite "personnalisée" ou encore de précision. Comment les enjeux éthiques sont-ils traités dans le développement de biotechnologies médicales ? Comment les institutions cliniques s’adaptent-elles au flux des innovations biomédicales ? Comment les objectifs de santé publique sont-ils pris en compte dans ce mouvement ? Enfin, comment rééquilibrer les surcoûts qui mettent sous pression les systèmes de sécurité sociale ?
A tous égards, ces questions sont largement communes entre la France et Cuba, pays où recherches et innovations biomédicales font l’objet d’une importante promotion, laquelle s’accompagne d’une forte préoccupation en termes de santé publique et de justice sociale. Assurément, Cuba est l’un des rares pays du « Sud » à disposer de telles capacités de recherche et de production en biotechnologies, comme en témoigne la mise au point de vaccins prophylactiques et de traitements immunologiques contre les maladies chroniques, innovants et biosimilaires (similaires à des molécules produites par des agents biologiques). Cependant, le contexte cubain des biotechnologies médicales présente des caractéristiques sui generis.
- Premièrement, un projet étatique a été mis en œuvre à partir des années 1980, visant à produire localement des biotechnologies afin d’améliorer le système de santé tout en engendrant des bénéfices économiques par leur exportation.
- Deuxièmement, regroupés au sein d’un « pôle scientifique », les centres de biotechnologies sont organisés en « cycle fermé », avec mise en œuvre en leur sein de l’ensemble du processus d’innovation, de la recherche fondamentale aux études précliniques et cliniques, jusqu’à la gestion de la propriété intellectuelle et la mise sur le marché. Ce modèle vise à orienter au mieux la R & D en fonction des priorités de santé publique du pays.
- Troisièmement, les pratiques de R & D se déroulent dans un contexte de relatif isolement et d’importantes difficultés économiques. En effet, depuis la crise dite de la « Période spéciale », faisant suite à la chute de l’URSS et aux renforcements de l’embargo/blocus des Etats-Unis, les pénuries affectent l’ensemble de la société. Dès lors, chercheurs et professionnels de la santé ont dû faire preuve d’inventivité et adapter localement technologies et normes pour permettre la poursuite des innovations.
En dépit de ces spécificités, l’espace des biotechnologies et de la recherche biomédicale cubain s’est développé dans le cadre de coopérations internationales, avec des pays du « Nord » - et notamment la France – et du « Sud ». De nombreuses recherches multinationales et des transferts de technologies ont ainsi été mis en œuvre. Dans le contexte de normalisation des relations avec les Etats-Unis et l’Union européenne, l’intégration internationale de l’espace biomédical cubain est appelée à croître. C’est en prenant en compte les spécificités politico-économiques, organisationnelles, socioculturelles et géopolitiques des contextes de la recherche biomédicale cubains et français que nous envisageons d’aborder des enjeux éthiques communs. Ceux-ci concernent l’ensemble de la chaîne de développement des biotechnologies : les aspects de biosécurité, la recherche clinique et la prise en compte des objectifs de santé publique et des contraintes économiques dans l’innovation. Par ailleurs, la France et Cuba accordant une grande importance à la santé publique et à la diplomatie scientifique internationales, la thématique de la recherche clinique et épidémiologique multinationale sera privilégiée.
Le séminaire franco-cubain de bioéthique s’inscrit dans la continuité de deux tables rondes organisées à Paris (29 septembre 2014 et 1er octobre 2015), avec la collaboration des comités d’éthique de l’IRD et de l’INSERM et d’échanges déjà établis avec des partenaires cubains. Plus généralement, il a pour but de mettre en place une collaboration pérenne entre chercheurs français et cubains autour de la réflexion sur les enjeux scientifiques et éthiques communs concernant les biotechnologies, la recherche biomédicale et la santé publique nationale et internationale.
Le séminaire se déroulera les 29 et 30 novembre 2016. Les journées des 28 novembre et 1 et 2 décembre seront consacrées à des visites d’institutions.
Thématiques et programme préliminaires
Lundi 28 novembre, INOR, salle de conférence (Teatro)
9h30 : Accueil de participants
9h45-10h15 : Conférence inaugurale à deux voix : Anne Marie Moulin (IRD) et Ismael Clark Arxer (président Comité national cubain de bioéthique, à confirmer)
Première table ronde : « Recherche et production en biotechnologies : biosécurité, usages et transformations du vivant » ; modérateurs : Daniel Piedra Herrera (CNCB), Anne Marie Moulin (IRD) et Maria Elena Faxas (INOR)
10h15-10h45 : Marie-Louise Michel (Institut Pasteur)
11h-11h15 : pause café
11h15-11h45 : Vicente Vérez Bencomo (Institut Finlay, à confirmer)
Thème suggéré : biosécurité et développement de vaccins contre les maladies infectieuses à l’Institut Finlay
12h-13h30 : déjeuner
13h30-14h : Fabrice Leclerc (Institut de biologie de la cellule, CNRS, à confirmer)
14h14-14h45 : Rolando Fernandez Yané (Institut de médecine tropicale Pedro Kuri – IPK -, à confirmer)
Présentation de la stratégie nationale de biosécurité
15h-15h30 : Diana Garcia del Barco Herrera (Centre d’ingénierie génétique et de biotechnologies – CIGB)
Enjeux éthiques du séquençage de l’ADN à Cuba
16h-17h : visite d’une polyclinique communautaire où se réalise un essai clinique (à confirmer)
Mardi 29 novembre, INOR, salle de conférence (Teatro)
Deuxième table ronde : "Biotechnologies et recherche clinique : coordination, protection des personnes et éthique de la santé publique" ; modérateurs : Nils Graber (EHESS), Lizet Sanchez (INOR) et Diana del Barco (CIGB)
9h30-10h : Rosa Ortiz Reyes (INOR)
Expérience du comité d’éthique de l’INOR dans l’évaluation de projets de recherche clinique
10h15-10h45 : Hélène Sancho-Garnier, (INSERM)
11h-11h15 : pause café
11h15-11h45 : Joséfina Lugo (INOR)
Présentation d’un questionnaire de qualité de vie adapté au contexte cubain
12h-13h30 : Pause déjeuner
13h30-14h : Olga Torres (CIM)
Impacts de la généralisation des comités d’éthique dans les institutions cliniques à Cuba
14h15-14h45 : Maria Amparo Pascual (Centre national de coordination des essais cliniques - CENCEC)
Enjeux éthiques de la conduite d’essais cliniques au niveau des centres de santé primaire (polycliniques)
15h-15h30 : Jean-Christophe Thalabard (Université Paris-Descartes)
15h30-16h30 : visite de l’INOR
Mercredi 30 novembre, Alliance française (Vieille Havane)
Troisième table ronde : « Biotechnologies et société : innovation, enjeux socioéconomiques et santé internationale », modérateurs : Nils Graber (EHESS), Maria Elena Faxas (INOR) et Diana del Barco Herrera (CIGB)
9h-9h15 : accueil des participants
9h15-9h45 : Agustin Lage (CIM, à confirmer)
Politique d’accès aux biotechnologies aux niveaux national et international : l’expérience du CIM
10h-10h30 : Anne Marie Moulin (IRD)
10h30-10h45 : Pause café
10h45-11h15 : Ana Maria Galvez (Ecole nationale de santé publique)
Evaluation socioéconomique des biotechnologies et innovations pharmaceutiques à Cuba
11h30-12h : Rafael Pérez Cristia (Centre pour le contrôle des médicaments et équipements médicaux - CECMED)
Le rôle de l’Agence des médicaments de Cuba pour favoriser une éthique de la santé publique
12h-13h30 : Pause déjeuner
13h30-14h : Ricardo Gonzalez (MINSAP)
Ethique de la psychiatrie à Cuba
14h15-14h45 : Mylène Botbol-Baum (université de Louvain, comité d’éthique Sud de l’INSERM)
15h-15h15 : pause café
15h15-15h45 : Gilberto Fleites (IPK)
Pour une éthique pragmatique : lutte contre les mauvaises pratiques et valeurs écologiques
16h16h30 : René Zamora (Centre Juan Pablo II)
L’éthique médicale d’influence chrétienne à Cuba
16h45-17h15 : Conclusion : Daniel Piedra Herrera (CNBC)
Pour une éthique à contre-courant d’inspiration poterienne
17h30-18h30 : visite de la vieille ville
Jeudi 1er décembre
Matin : visite du Centre d’immunologie moléculaire (CIM)
Après-midi : visite de l’Institut de médecine tropicale Pedro Kuri (IPK)
Vendredi 2 décembre
Matin : visite du Centre d’ingénierie génétique et de biotechnologies (CIGB)
Après-midi : visite de l’Institut Finlay
Fin de journée : réception à l’ambassade de France
Comité d’organisation :
Daniel PIEDRA HERRERA, Comité national cubain de bioéthique
Diana DEL BARCO HERRERA, Comité d’éthique du CIGB
Maria Elena FAXAS, INOR
Nils GRABER, Cermes 3
Anne Marie MOULIN, Comité d’éthique (CCDE) de l’IRD
Christian BYK, Comité intergouvernemental de bioéthique de l’UNESCO