Comment aider au mieux, en matière de soins de santé, les personnes âgées dépendantes ? Avec pour objectif premier, leur bien-être et leur permettre de rester le plus longtemps chez elles ? Pour répondre à cette question de société, l’INAMI a financé une recherche interuniversitaire, coordonnée par l’UCL, en collaboration avec la KU Leuven et l’UAntwerpen. L’une des réponse innovante apportée par les chercheurs ? La mise en place d’une nouvelle fonction, celle de case manager. Soit une personne jouant le rôle de conseiller afin d’identifier le service ou le soin le plus approprié dans la durée, dans une situation de crise. Bénéfice ? Une qualité de vie retrouvée pour la personne âgée et une diminution des coûts de 400 € par mois.
Durant 7 ans, des chercheurs de l’UCL, la KU Leuven, et l’UAntwerpen (1) ont évalué, dans le cadre d’une vaste recherche interuniversitaire regroupant 62 études pilotes auprès de 13 844 personnes fragiles vivant à domicile, des interventions actuellement non remboursées par l’INAMI qui visent à une meilleure qualité de vie des personnes âgées dépendante et à une diminution des coûts de consommation des soins. L’équipe universitaire, coordonnée par l’UCL et composée de chercheurs d’horizons divers (médecins, infirmiers, sociologues, économistes et kinésithérapeutes), a analysé les effets des interventions sur la santé des personnes âgées et leurs aidants proches, sur les coûts et l’utilisation des services de soins de santé.
L’étude s’est d’abord attelée à identifier les différentes situations vécues par les personnes âgées dépendantes (au niveau fonctionnel et cognitif) et leurs aidants proches. Une étape qui a permis de mesurer l’efficacité et le coût des interventions, en fonction des caractéristiques des personnes âgées mais aussi des réalités locales en matière de soins (par ex. la présence d’un service intégré d’aide et soins à domicile opérationnel). Les chercheurs ont pointé des situations particulières dans lesquelles les services professionnels à domicile sont capitaux pour la qualité de vie de la personne âgée et son entourage : déni de soins, sous-utilisation de services infirmiers ou fardeau pour les proches. L’étude a ensuite permis d’objectiver la consommation de soins et les coûts associés à la dépendance à domicile. Au total les coûts liés à cette dépendance sont évalués à 1345 €/mois, à charge de l’INAMI et des régions.
Les chercheurs ont donc tenté de trouver des solutions, permettant d’augmenter l’efficacité des soins, tout en améliorant le bien-être de la personne âgée et en diminuant les coûts liés à ces soins. Résultats ? Ils ont pointé un service existant, l’ergothérapie, comme étant d’ores et déjà très efficient. Et parmi les nouvelles pistes innovantes testées, c’est l’intervention d’un case manager qui est la plus efficace. Soit une personne (infirmière, aide-soignante, ergothérapeute, etc.) qui joue le rôle de conseiller auprès de la personne âgée, dans une situation d’organisation de soins très complexe. Son rôle ? L’aider à identifier le service ou le soin le plus approprié dans la durée.
Concrètement, le case manager utilise notamment une plateforme interdisciplinaire, le BelRAI, qui permet le partage des informations au sujet d’une personne, avec l’accord de celle-ci, entre les différents soignants. Les résultats de cette évaluation globale vont permettre de réaliser un plan de soins avec la personne et son entourage, familial et professionnel, tels que les aidants proches, le médecin généraliste et les autres intervenants du domicile.
L’étude de l’UCL, la KU Leuven et l’UAntwerpen a clairement démontré l’efficacité du case management : réduction de l’utilisation de services (tels que les urgences des hôpitaux), meilleure offre de soins infirmiers à domicile et réduction importante des coûts de services facturés notamment à l’INAMI. À titre d’exemple pour la même personne âgée dépendante dont le réseau d’aide et de soins est en difficulté, l’intervention d’un case manager permet d’économiser près de 400€ par mois, principalement grâce à une mutualisation des moyens. Enfin, l’action du case manager améliore aussi nettement, et c’est sans doute le plus important, la qualité de vie des personnes âgées dépendantes et le ressenti des aidants proches.
En matière de formation, les conclusions de cette étude pourraient mener à une nouvelle filière, correspondant à cette nouvelle fonction de case manager. En FWB, l’UCL est actuellement la seule université à proposer un cours à option sur la coordination et l’organisation de réseaux d’aide et soins (cours allant dans le sens du case manager), au sein de son master en santé publique.
Et maintenant ? L’évaluation menée par l’UCL, la KU Leuven et l’UAntwerpen devrait contribuer à renforcer l’intégration des soins en Belgique, notamment pour les personnes nécessitant des soins de longue durée. Le case management est une stratégie qui répond pleinement aux besoins actuels, tout en restant centré sur le patient. Cette fonction arrive au bon moment, dans un contexte de diminution de soins intra-hospitaliers et de volonté d’optimiser l’institutionnalisation en maison de repos. L’équipe de chercheurs a relayé ses conclusions auprès de la ministre fédérale de la santé, Maggie De Block. La balle est désormais dans le camp politique.
1. L’ULiège a participé au début de l’étude, de 2010 à 2014.