Note sur la portée politique de la notion de paysage

Jean-Philippe De Visscher
  Note sur la portée politique de la notion de paysage ( 1,5 Mo)
Les pages du laa, No 09, juin 2007

Le paysage, comme objet de pensée théorique et comme horizon des transformations matérielles, mobilise depuis quelques années de nombreuses disciplines de recherche. Il s’est émancipé de ses attaches originaires qui l’assimilaient à une esthétique du visible, et plus largement, à une représentation de la nature humanisée. Il est à peu près entendu aujourd’hui que la notion de paysage excède à la fois, sans toutefois les exclure, la visibilité des territoires et les formes apparentes de la nature. Les paysages sont noués au plus intime des dispositifs culturels où nos sociétés se conduisent, de telle sorte qu’ils en paraissent à la fois causes et effets : nous « produisons » les paysages ­(nous fabriquons leur artificialité qui façonne jusqu’à nos sentiments de la nature), et aussi bien les paysages réels pèsent ou facilitent : ils participent à l’ensemble des structures sociétales, à ce titre ils « agissent » sur nos objets mentaux, nos images du monde, nos comportements individuels ou collectifs, et leur permettent de s’articuler réciproquement.
 
Si les paysages ne sont pas les simples projections des activités humaines sur les milieux ambiants, mais engagent de facto la réalité même des déploiements sociaux, il convient d’admettre qu’ils ne sont pas disposés aléatoirement, mais au contraire qu’ils s’ordonnent et qu’ils ordonnent au sein des dispositifs culturels auxquels nous participons : ils sont architecturés et leurs architectures réclament d’être pensées théoriquement.
 
Le texte de Jean-Philippe de Visscher que nous publions ce mois de juin 2007 répond significativement à une telle exigence. Il porte le titre "Note sur la portée politique de la notion de paysage"; en voici un extrait : « ...la portée du paysage dépasse, me semble-t-il, la simple constitution d’une "belle composition″ offerte à la contemplation. Le mot paysage se dégage de sa référence usuelle à la peinture de paysage et de sa réduction à un objet esthétique : reprendre l’écriture d’un paysage – et, par là même, condamner sa possible fin – est un acte profondément politique. En (ré-)instituant son caractère impossédable, s’instaure simultanément sa dimension publique.»