Axes de recherche

 

Anthropologie : Pascale Jamoulle

Chaque culture construit des rôles et des pratiques, des caractéristiques et des différences, des hiérarchies et des spécificités pour les hommes et les femmes dont elle se compose. Le masculin et le féminin reçoivent alors des connotations particulières qui peuvent apparaître avec plus ou moins de constance. L’anthropologie prospective interroge ces relations entre les hommes et les femmes et les rôles sociaux qu’elles impliquent.

 

Bioéthique et médecine: Mylène Baum-Botbol

La recherche de genre en bioéthique s'appuie sur des disciplines plurielles. Elle constitue une perspective critique face à l'incidence des avancées biotechnologiques et génétiques qui modifient nos repères éthiques, juridiques et anthropologiques sur la naturalité de l'humain, de la filiation, de la maternité, etc.

La question des droits reproductifs des femmes a été à la fois soutenue et entravée par la biomédecine et les techniques de PMA. Ces techniques ont mené à des recherches de "gendered medicine" qui a tendance à essentialiser la différence sexuelle et l'orientation de la recherche en médecine, ce que l'approche genre permet de repenser. 

Une attention particulière est portée aux nouvelles formes de discrimination que crée le transfert de technologies vers les pays émergents, sans sensibilisation aux dimensions de contexte, ainsi qu'a la hiérarchisation des financements de la recherche médicale en termes de genre.

 

Communication : Sarah Sepulchre

La Communication est un champ assez vaste qui recouvre des études très variées.

Aussi bien les analyses de contenu que les analyses des mondes de la communication sont concernées par les études de genre. Les messages sont connectés à la société et reflètent en partie les représentations à l'œuvre dans le monde. Les articles journalistiques, les sites d'entreprises, les produits culturels, les campagnes de sensibilisation, par exemple, véhiculent des stéréotypes. La recherche met en évidence ces discours marqués. Les pratiques au sein des mondes de la communication sont, comme dans n'importe quelles organisations humaines, influencées par les rôles sexués. Comme partout ailleurs, le fait d'être un homme ou une femme influence les carrières, les comportements, les messages.

La recherche en communication peut établir des bilans genrés des productions communicationnelles et des modes de fonctionnement des secteurs. Les experts du champ peuvent également servir d'experts afin de produire des communications ou des actions qui améliorent la prise de conscience des différents intervenants, qui plaident pour des communications et des fonctionnements moins gender-blind.

 

Développement : Isabel Yepez

La recherche en genre et développement, s’interroge sur l’origine de la subordination des femmes, sur les causes de leur invisibilité dans les champs économiques et/ou politiques, en remettant ainsi en question les objectifs et finalités des politiques de développement dans des contextes socio-culturels différents. Un autre axe de réflexion analyse les liens entre la production de marchandises et de services et la reproduction sociale dans le contexte de la nouvelle division internationale du travail. Un troisième axe touche aux questions liées aux droits et à la citoyenneté ainsi qu’au pouvoir, à propos de la constitution des femmes et hommes en sujets de leur propre destin. Finalement sont étudiées les transformations des identités et des rapports de genre au niveau domestique local, national et global, étudiant les liens entre ces transformations et la participation à la sphère publique ainsi que l’accès aux droits. Une attention particulière est accordée aux paternités et maternités dans des contextes socio-culturels non occidentaux, ainsi qu’aux impacts différenciés de l’expérience migratoire sur la capacité des hommes et des femmes du Sud à être acteurs du développement de leurs pays.

 

Droit : Pascale Vielle

La recherche de genre, en droit, regroupe deux catégories distinctes de questions. La première recouvre les approches qui permettent de poser un regard critique sur le droit, du point de vue du genre. Les études de genre, divisées en différents courants, suscitent des analyses fécondes dans chacune des branches du droit. Elles permettent de comprendre comment l'institution juridique reflète, et contribue à construire les rôles de genre dans la société. Une seconde dimension concerne la mobilisation d'instruments juridiques, ou quasi-juridiques (comme la soft law ou le gendermainstreaming) pour promouvoir l'égalité et la représentation équilibrée des femmes et des hommes. Cette dimension convoque le droit international, européen, national et comparé de l'égalité, mais s'intéresse aussi de près à l'effectivité et à l'efficacité de la norme juridique dans la réalisation des objectifs égalitaires. De ce point de vue, elle tient compte notamment de l'appropriation des instruments juridiques et de gouvernance par les acteurs de l'égalité (issus du monde public au sens large - législatif, exécutif et judiciaire - de la société civile et de la recherche), mais également de la participation équilibrée des femmes et des hommes dans ces différentes sphères.

 

Economie : Florence Degavre

Les recherches qui recouvrent le champ de l’économie du genre tentent de comprendre les effets de la différence des sexes dans le champ économique en traitant des inégalités en termes de revenus, de salaires, de taux de pauvreté ou encore, plus globalement, en s’interrogeant sur les niveaux et conditions de bien-être des hommes et des femmes. Cela recouvre:

  • une révision des modèles théoriques existants basés sur le postulat de l’agent « asexué », en référence à l’homo economicus
  • une extension des domaines empiriques couverts par les recherches aux activités économiques non rémunérées des femmes (comme le care par exemple ou le travail agricole des femmes dans les champs familiaux)
  • l’étude des discriminations sexuelles dans les politiques publiques
  • l’exploration et la valorisation de rationalités économiques alternatives (arrimées à l’expérience de care notamment, ou à l’idée de « nurturance » par exemple) en vue de fonder un nouveau modèle de société.

Il n’existe pas une économie du genre totalement distincte des écoles déjà reconnues en économie politique. Un nombre important de recherches s’inscrivent aujourd’hui au sein du paradigme néo-classique et utilisent ses concepts (marché, offre et demande) ou ses outils (comme les modèles). D’autres ambitionnent de créer un nouveau paradigme économique autour de l’idée de reproduction humaine et s’inscrivent dans une vision substantive de l’économie.

 

Histoire: Silvia Mostaccio

La perspective du genre est constitutive pour les recherches historiques (leur discipline mère). En interrogeant les normes, les croyances et les pratiques des êtres humaines dans le temps et dans l’espace, l’histoire doit, entre autre, se poser la question des interactions entre les différents acteurs historiques. Les hommes et les femmes, en tant que individus et en tant que collectivités, se retrouvent donc au centre d’analyses croisées, visant l’individuation et l’interprétation des résultats historiques de leurs interactions, dans le conflit et/ou dans la collaboration. Dans ce cadre, la prise en compte du statut des acteurs reste essentielle ; une attention particulière est réservée à l’exercice des pouvoirs formels et informels qui ont été à la base des relations entre les sexes. Une bonne partie des études actuellement en cours vise l’articulation entre les discours sur le devoir-être de la femme et de l’homme en société, et l’hétérogénéité des pratiques. Ces discours nous renvoient à des contextes et à des autorités différentes : les institutions politiques, juridiques et religieuses, mais aussi les intellectuels.

 

Littératures : Damien Zanone

En tant qu’art de la représentation, la littérature constitue un terrain privilégié pour les études de genre : de part en part, elle est la mise en représentation du rapport entre les sexes et se présente donc comme le lieu d’un discours continu sur les sexes et sur leur différence. Approcher la littérature à partir de la question du genre permet de réfléchir dans plusieurs directions : l’étude de la littérature comme lieu de représentation de la différence des sexes et comme lieu d’analyse de leurs relations ; l’étude du rôle de la littérature dans la construction des représentations sexuées à l’œuvre dans la société et donc dans l’élaboration d’un imaginaire ; l’étude des processus de canonisation afin d’éclairer les stéréotypes qui sont attachés aux écrivaines et expliquer l’habituelle minimisation de leur importance ; l’étude du « genre des genres », c’est-à-dire du lien entre genre et genre littéraire dans différentes périodes de l’histoire (par exemple, l’affinité supposée entre femmes et romans dans un discours courant entre le XVIIe et le XIXe siècles).

 

Philosophie : Nathalie Frogneux

Avec sa prétention à l’universalité et à la neutralité en matière anthropologique, la tradition philosophique a le plus souvent ignoré la différence des sexes et du genre. Elle a ainsi construit un concept d’homme ou d’existence tronqué, partial et partiel sous le couvert de l’Universel. Depuis plus d’un demi-siècle, de nouvelles approches philosophiques en anthropologie philosophique, en éthique, en philosophie pratique, en philosophie sociale et en philosophie du langage ont tenté de dépasser cette carence en prenant en considération la catégorie critique du genre.

 

Psychologie: Vincent Yzerbyt

La psychologie aborde la question du genre sous différents angles. En psychologie sociale et en psychologie du travail et des organisations, par exemple, les chercheurs étudient la manière dont les systèmes de croyances de genre, avec leurs éléments descriptifs et prescriptifs, affectent les personnes dans les interactions sociales et au sein des organisations. Ils s’intéressent également aux réactions cognitives, émotionnelles et comportementales des personnes qui subissent des discriminations liées au genre. La psychologie du développement, la psychologie de la personnalité et la psychologie clinique se penchent, quant à elles, sur la manière dont le genre est une dimension constitutive de la personne humaine, tant dans sa construction que dans son fonctionnement normal ou pathologique.

 

Sciences du travail: Matthieu de Nanteuil

Appliquée aux questions du travail, la sociologie du genre concerne à la division sexuelle du travail mais s’intéresse, plus largement, aux formes de construction des identités sexuées par le travail et aux phénomènes de domination-discrimination qui en résultent. Dans ce contexte, on distingue trois séries de travaux :

  • les premiers sont directement issus des analyses à la frontière entre sociologie du travail et sociologie de l’emploi : ils mettent l’accent sur les phénomènes de « plafond de verre » (dans les organisations) et de « mur de verre » (sur le marché du travail) ;
  • les deuxièmes renouent avec l’analyse critique de la domination, mais en s’intéressant aux nouvelles formes de la domination envers les femmes : à la maison, dans les organisations, sur le marché du travail, dans l’espace public en général ;
  • les troisièmes mettent d’avantage l’accent sur la formation des stéréotypes sexués qui déterminent la construction d’une offre d’emploi « typiquement » féminine, contribuant ainsi à la discrimination envers les femmes, mais aussi à la diffusion de pratiques « viriles » de gestion des personnes. L’horizon est alors celui de la déconstruction des stéréotypes sexués, au bénéfice d’identités plus ouvertes.

 

Sciences naturelles: Caroline Vincke

La recherche de genre dans le domaine des sciences et technologies à l'UCL en est à ses prémices, et est menée en collaboration avec des collègues des sciences humaines. Comment la question du genre impacte ou est impactée par le développement des sciences et technologies ? Comment garantir l'attractivité des formations et des métiers pour les jeunes femmes, de plus en plus nombreuses parmi la population étudiante en sciences et technologies?

 

Sociologie : Bernard Fusulier

Fondamentalement, la sociologie a contribué et contribue à déconstruire la vision naturaliste des différences sociales entre les hommes et les femmes, en particulier en ce qui concerne leur répartition inégalitaire dans les fonctions, rôles et positions au sein de la société. La perspective de genre a historiquement été portée, dans l’espace francophone, par des recherches visant à faire reconnaître les activités domestiques des femmes comme un travail. Elle montre combien les articulations entre les sphères domestiques et professionnelles sont marquées par des assignations sexuées qui produisent et reproduisent les inégalités entre les deux sexes. La dimension du genre s'est progressivement imposée comme une perspective d'analyse pertinente en sociologie de la famille, du travail, de l’emploi, de l'éducation, de la santé, des politiques publiques... Aujourd'hui, la dimension du genre transcende ces champs spécifiques et apparaît comme une clé de lecture transversale des phénomènes sociaux au même titre que la lecture en termes d’origine sociale par exemple. L'approche intersectionnelle vise d'ailleurs à croiser différentes propriétés sociales (genre, classe sociale, ethnicité...).

 

Théologie et sciences des religions : Walter Lesch

Les catégories de sexe et de genre jouent un rôle central dans la structuration de l’imaginaire et de la vie concrète des religions. Elles influencent les représentations du divin et leurs visualisations, les rapports de pouvoir dans les communautés religieuses, les pratiques rituelles et les doctrines morales, notamment dans les discours souvent ambigus sur le corps humain en tant que lieu du salut et du péché, objet de normes rigides et d’extase. Dans tous ces contextes, les études de genre offrent des outils indispensables pour mieux analyser les fondements anthropologiques du phénomène religieux et de ses expressions multiples: à partir des textes fondateurs jusqu'au controverses actuelles.